Mon nin-nin
Il fut un temps, certes (très) lointain, où je croyais incarner l’être le plus important sur Terre.
Je précise que ma mère me mettait encore des couches, à cette époque.
Malheureusement, les choses se sont assez vite dégradées - sitôt que Maman a repris son travail.
Elle m’a emmené chez une dame qui, malgré son sourire de façade, était à des années-lumière de m’inspirer la même confiance ; une dame qui gardait toute une ribambelle d’autres mioches, des braillards aux nez morveux.
Après quelques bonnes paroles qui se voulaient rassurantes, Maman m’y abandonnât, non sans me laisser mon Nin-Nin : un ours en peluche délavé, à qui il manquait une oreille.
La porte tout juste refermée sur ma génitrice, un garçon aux cheveux ébouriffés m’avait arraché ma peluche des mains sous l’œil indifférent de la nourrice, me faisant ainsi comprendre - et cela, sans qu’un seul mot ne soit échangé -, que j’avais beau être roi (ou roitelet) entre les quatre murs de ma maison, en ces lieux je n’étais personne.
Cette prise de conscience remonte plus d’un demi-siècle et pourtant, je m’en souviens aussi précisément que si cela s’était passé hier.
Je crois que je ne m’en suis jamais vraiment remis.
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